Testata


De la revue Science et Foi n° 43 - le trimestre 1997

LA SCIENCE EN MARCHE - partie 1 - partie 2

Guy Berthault

Dire que la science est en marche est, pour tout le monde, une évidence, au vu des découvertes qui se font dans le temps, dans toutes les disciplines. Au point que la science tend à devenir le credo du monde, reléguant dans le passe philosophies et religions. Pourtant, la science, qui est la connaissance des faits, a ses limites, surtout dans les sciences de la nature où notre savoir reste limite à la fois dans le temps et dans l'espace.

Mais dans ce domaine des sciences de la nature, la science contemporaine prétend tout expliquer par des causes premières naturelles, notamment la genèse du cosmos et de la vie, rejetant toute possibilité de cause surnaturelle. C'est un préjugé qui la conduit fatalement à adhérer, même sans preuve, à la théorie de l'évolution qui intègre les sciences de la nature (astronomie, chimie, biologie, géologie), parce qu'il n'y a pas d'autre explication naturaliste des origines. En conséquence de quoi la science, dans ces domaines, perd son objectivité. Elle ne part plus du fait objectif pour élaborer une hypothèse expli-quant la cause des faits, à laquelle on peut en substituer une autre, ni d'autres faits la justifiant.

Elle se fonde sur son préjugé qui devient théorie. Avec le danger que seuls les faits venant à son appui seront pris en considération. Cette dérive des sciences de la nature a commencé au Moyen-âge, lorsque l'Eglise a fondé nombre d'Universités. On y enseignait alors l'Astronomie géocentriste inspirée de la théorie de Ptolémée, selon laquelle la Terre était au centre du monde, et les étoiles, le soleil, les planètes tournaient autour d'elle(1). Bien que le récit de la Genèse ne dise pas que la terre soit au centre du monde, la théologie qui avait pris une grande place au Moyen Age, considérait que le Christ n'a-vait pu opérer la Rédemption qu'au centre de l'Univers. Fernand Crombette en a longuement parlé dans"Galilée avait-il tort ou raison?.

A la théorie géocentriste répondit la théorie héliocentriste formulée primitivement par Aristarque de Samos et reprise par Copernic dans son ouvrage: De revolutionibus orbium coelestium publié en 1543. Le soleil devenait le centre du monde, autour duquel tournaient toutes les planètes y compris la Terre. Les observations de Tycho Brahé, puis de Képler, consignées dans l'ouvrage de ce dernier, Astronomia Nova publié en 1609, confirment la rotation des planètes autour du soleil, sauf pour la Terre, car les apparences des mouvements relatifs des planètes par rapport au soleil sont les mêmes, que le soleil tourne autour de la Terre ou l'inverse. C'est en 1633 qu'eut lieu le procès de Galilée où furent condamnées les propositions de rotation de la Terre sur elle-même et autour du soleil.
Des lors les philosophes condamnèrent d'une manière voilée ce qu'ils considéraient comme une position dogmatique de l'Eglise. A cette position dogmatique, ils répondent par une autre position dogmatique. Le procès de Galilée devait symboliser cette rupture entre l'Eglise et la philosophie qui allait marquer la science moderne. Le Discours de la Méthode de Descartes, publié en 1637, en est résulté. En Astronomie, l'ouvrage fondamental est le De Philosophiae Naturalis Principia Mathematica de Isaac Newton, publié en 1687, qui formule la loi de gravitation universelle à partir de laquelle il calcu-lera la masse du soleil comme étant 330 000 fois celle de la terre. De ce fait le centre de gravite du système solaire se trouve, selon lui, au sein du soleil. Donc le soleil est bien le centre autour duquel tournent toutes les planètes, y compris la terre, justifiant l'hélio-centrisme, et condamnant du même coup, au pian scientifique, la position géocentriste de l'Eglise qui sera abandonnée par Benoît XIV en 1757.

Il fut donc admis, des 1687, que la Terre tournait effectivement autour du soleil à 30 km/s. Ce qui fait que lorsque Bradley découvrit le phénomène de l'aberration astronomique, qui est un mouvement elliptique apparent des étoiles qui se conjugue avec un autre mouvement elliptique, la parallaxe des étoiles, réplique apparente du mouvement annuel de la Terre, il expliqua l'aberration par la conjugaison de la vitesse de la lumière provenant des étoiles, avec la vitesse de la Terre autour du soleil à 30 km/s.

Il en rendit compte dans une communication à la Société Royale d'Angleterre en 1728. n supposait toutefois que la lumière stellaire n'était pas entrainée par le mouvement de la Terre. Puis Fresnel, en 1846 découvrit le phénomène des interférences lumineuses, ce qui conduisit à considérer la lumière comme un phénomène d'ondes se déplaçant dans un milieu immobile, l'éther. En 1851, Foucault installa au Panthéon son pendule, dont les variations azimutales furent considérées comme la preuve absolue de la rotation de la Terre sur elle-même. On pouvait donc considérer que cette position de l'Eglise qui avait inspiré la condamnation de Galilée, à savoir que la Terre étant le centre du monde, tous les astres tournant autour d'elle, et qu'elle n'avait pas de mouvement de rotation, était définitivement infirmée, bien qu'on put toujours se fier aux apparences.

L'Astronomie était alors une science sans problème.

Toutefois, l'hypothèse de Bradley restait à démontrer: "la lumière stellaire n'est pas entrainée par la Terre", ou ce qui revenait au même, après Fresnel : "l'éther est immobile". En 1887, le physicien américain Michelson, utilisant un interféromètre devant produire des interférences lumineuses, permettant d'évaluer la vitesse de la Terre par rapport à l'éther, observa effectivement ces interférences, mais le calcul donna une vitesse de 8,8 Km/s qui ne correspondait pas au 30 Km/s attendus. Stokes expliqua l'écart par un effet d'entraînement partiel de l'éther par la Terre. Mais ce résultat, qui remettait en cause l'e-xplication de l'aberration, considérée comme une preuve fondamentale du mouvement de la Terre, troublait les physiciens, qui préféreront ignorer les résultats de cette expé-rience pourtant maintes fois répétée, tant par Michelson que par d'autres, notamment Miller.

Ils considéreront que l'expérience n'avait pas mis en évidence le déplacement de la Terre par rapport à l'éther et cherchèrent une explication théorique de cette interprétation. Lorentz, le premier, imagina une contraction de l'espace dans le sens du mouvement de la Terre; le temps, absolu, devient relatif au mouvement. Ce qui se traduisit par les équations de Lorentz qui sont à la base de la théorie de la relativité restreinte, formulée ini-tialement par Poincaré, et reprise par Einstein dans son ouvrage De l'électrodynamique des corps en mouvement publié en 1905.

En 1929, Hubble interpréta le décalage spectral systématique vers le rouge des galaxies comme un effet de l'expansion de l'Univers. Ce qui conduisit le belge G. Lemaître en 1931 à échafauder la théorie du Big-bang, élaborée par la suite en 1948 par Gamow. Voilà l'histoire très raccourcie, de l'Astronomie jusqu'à nos jours. La question se pose alors. Où est la vérité? Question à laquelle il m'est impossible de répondre. n me sera plus facile de mettre en lumière les erreurs possibles, dans le domaine scientifique.

Que l'Eglise aie pu se tromper dans le domaine scientifique, qui n'est pas son domaine propre, est possible, particulièrement en Astronomie. Ptolémée était un Grec, non chrétien, qui ne s'est pas référé à la Bible pour échafauder sa théorie géocentriste. Fernand Crombette a étudié cette question dans Galilée avait-il tort ou raison? et a soutenu le géocentrisme, tout en admettant la rotation de la Terre sur elle-même. Mais il n'a pu donner une explication valable de l'aberration, compatible avec le géocentrisme. Moi-même, j'ai donne dans Galilée avait tort une explication qui s'est révélée fausse. Cela dit, il convient, sans préjugé, de vérifier si l'astronomie s'est construite seulement à partir d'observations et d'expériences, où si, à certains moments de son histoire, elle a intégré des interprétations discutables à la base de son raisonnement. On vient d'en voir un exemple avec l'expérience de Michelson. J'y reviendrai.

Cette démarche m'a amené à rechercher plus avant de telles interprétations dans l'astronomie héliocentriste. Non à partir de Kepler dont les lois résultent d'observations. Mais à partir de Newton qui, le premier, a prétendu apporter une preuve de l'héliocentrisme. En lisant les Principia Mathematica, j'ai constate que Newton ne faisait pas référence à Kepler, mais qu'il fondait son raisonnement, en philosophie, sur les définitions et lois qu'il formulait. Mon ami E. Broëns, à ma demande, a fait un examen critique des Principia de Newton, paru dans Science et Foi n° 39, où il fait ressortir que Newton a prétendu démontrer sa loi n° III dite de l'égalité de l'action et de la réaction entre deux astres distants, en introduisant un astre fictif entre les 2, pour se ramener au cas du contact direct entre deux corps.

E. Broëns fait justement remarquer qu'une attraction à distance n'est pas de même nature que la pression d'un corps sur un autre. Par conséquent la loi n° III n'est pas démontrée. Or, c'est elle qui justifiait l'introduction des masses dans la loi de Newton. Il en résulte que le calcul des masses et la démonstration de l'héliocentrisme que j'ai citée plus haut, ne sont nullement démontrés, comme je l'ai souligné dans un additif à l'article de E. Broëns. Reste alors l'observation astronomique comme preuve de l'héliocentrisme. Or, nous l'avons vu, les expériences de Michelson et de Miller ont infirmé l'hypothèse de Bradley-Fresnel d'un "vent d'éther" de 30 km/s, condition de l'explication classique de l'aberration. Mais la théorie de la relativité restreinte a su justifier l'aberration à partir des formules de Lorentz.

A ce sujet, mon ami Maurice Allais, préludant à la parution de son livre L'anisotropie de l'espace, vient de faire paraître dans La Jaune et la Rouge (novembre 1995), revue de l'X, un article intitulé "Les expériences de Dayton C. Miller 1925-1926 et la théorie de la relativité" dont voici le résumé:

"Les expériences de Dayton C. Miller 1925-1926 se caractérisent par une cohérence remarquable, indépendante de tout effet pervers. Elles démontrent que la vitesse de la lumière n'est pas la même dans toutes les directions. Elles démontrent la possibilité de mettre en évidence le mouvement de la Terre sur son orbite à partir d'expériences purement terrestres. Par là même le fondement de la théorie de la relativité se trouve infirmé."

Nous sommes donc loin, par rapport il y a plus d'un siècle, des vérités établies de l'as-tronomie. Quant au Big-bang, s'il y a en sa faveur le rayonnement du fond du ciel détecté en 1965 par Penzias et Wilson, ainsi que l'abondance, dans l'univers, de l'hydrogène et de l'hélium, ceux-ci pourraient bien etre responsable du décalage vers le rouge des raies du spectre des galaxies, dans la mesure ou celles-ci sont entourées de ces gaz. Comme on le voit, il y a en Astronomie des observations mais aussi des interprétations qui peuvent justifier les faits de manière très différentes.

Pour clore ce chapitre, je voudrais indiquer que notre équipe qui a opéré lors de l'éclipse du soleil du 3 novembre 1994 au Brésil, - composée de 10 membres dont 7 spécialistes de la gravimétrie (2 belges de l'observatoire de Belgique, 2 russes de l'institut d'Astronomie de Russie, 2 brésiliens de l'Université du Paraná et un informaticien italien) avec 43 instruments mesurant en divers lieu la gravité, la température, la pression, l'hygrométrie, l'intensité lumineuse - a détecté sur les gravimètres relatifs une augmentation de 1,53 µGal de la gravité, lors de l'éclipse, alors qu'elle aurait dû diminuer, et ce, après élimination de tous les facteurs parasites, tels que variation de pression, de température, etc. C'est assez dire qu'il y a encore un champ expérimental vaste dans le domaine de la gravimétrie qui peut modifier la conception initiale newtonienne.

J'en viens maintenant à l'autre science: la géologie historique ou stratigraphie. Les Principia Mathematica étant devenus la "Bible" -des philosophes(2), ceux-ci, au nom des "Lumières" n'ont eu de cesse de démolir l'enseignement de l'Eglise dans d'autres domaines, notamment l'origine de la vie. Si la Genèse laisse quelque doute sur la situation de la Terre dans l'espace, elle n'en laisse pas sur l'origine de la vie. Dieu a créé chaque plante, chaque animal, selon son espèce, et l'homme à Son image, et ce il y a quelque 6000 ans si l'on s'en réfère à la chronologie biblique. Dans sa 34eme lettre à Voltaire, d'Alembert lui demande de recevoir à Ferney un géologue dont il dit: "Je vous prie de recevoir Mr. Demarets. Il s'y connaît dans les pierres. Il serait bien capable de renverser la chronologie du vieux bonhomme Moìse."

C'est dans ce climat pré-révolutionnaire qu'est née la stratigraphie. Puis sur la stratification des roches sédimentaires s'est fondée l'échelle des temps géologiques. En 1783, l'Abbé Giraud-Soulavie a illustré le principe de base de la stratigraphie sur l'exemple des dépôts horizontaux stratifiés du plateau du Vivarais en l'énonçant ainsi:

"Les strates s'étant déposées à l'horizontale et les unes sur les autres, toute strate est plus jeune que celle qu'elle recouvre et plus vielle que celle qui la recouvre." Premier principe, auquel s'ajoute le principe de continuité: "Toute strate est de même âge en tout point".

Le fait qu'en géologie on emploie indifféremment le mot "strate" ou le mot "couche" prouve que les géologues fondateurs ont pris, sans discussion, les strates superposées pour des couches sédimentaires successives. Je reviendrai sur ce point fondamental. Les corrélations entre terrains stratifiés ont donc été établies selon ces deux principes aux-quels s'ajouteront plus tard le principe d'identité paléontologique et le principe de l'actualisme. Il en est résulté l'échelle des temps géologiques où les espèces, se succédant, induisent l'évolution des espèces. C'est pourquoi, les évolutionnistes parlent du fait de l'évolution des espèces, qu'ils étayent par des expériences de mutations et de sélections d'espèces qui, en soi, ne prouvent pas l'évolution.

Le Pape lui-même dans une adresse le 23 octobre dernier aux membres de l'Académie Pontificale des Sciences admet que l'évolution des espèces est "plus qu'une hypothèse" et que "la convergence, nullement recherchée ou provoquée, des résultat des travaux menés indépendamment les uns des autres, constitue par elle-même un argument significatif à l'appui de cette théorie". C'est assez dire à quel niveau cette théorie, qui a trouvé son chantre avec P. Teilhard de Chardin, a pénétré l'Elise. Or depuis plus de 20 ans, j'ai étudié cette science de base, la stratigraphie, ce qui m'a conduit aux résultats que je présente maintenant.

Mes travaux résultent d'une réflexion que je m'étais faite sur la validité des fondements de l'échelle des temps, qui identifie les strates rocheuses superposées, à des couches sédimentaires successives, d'où résultent le principe de superposition.

La lecture des comptes-rendus de la campagne de forages sous-marine du navire américain "Glomar Challenger" détermina mon intérêt pour la sédimentologie; et notamment pour les travaux de l'un de ses fondateurs, Johannes Walther, sur les sédiments du golfe de Naples qui le conduisirent à formuler sa loi: "les facies superposés dans une série géologique étaient juxtaposés dans le paysage au moment de leur dépôt". Elle est à la base de la stratigraphie séquentielle, pratiquée aujourd'hui par les sédimentologues et qui vient de faire l'objet en décembre 1995 d'une séance spécialisée de la Société Géologique de France et de l'Association Paléontologique de France (SGF. Lettre semestrielle - décembre 1995) Dès l'énoncé, cette loi contredit le principe de superposition. Elle me conduisit à me poser, à l'échelon inférieur au facies, celui des strates, la question de leur identification à des couches sédimentaires.

J'eus alors l'idée de prélever un grès faiblement cimenté. Je réduisis l'échantillon en ses particules de sable, que je fis s'écouler en continu dans un récipient en verre. La même lamination (stratification de faible épaisseur), observée dans l'échantillon, apparut dans le dépôt, à sec ou dans l'eau.

Cette lamination ne résultait pas de couches sédimentaires successives, mais bien de la ségrégation des particules selon leur taille. Sur le conseil du paléontologue Jean Piveteau, alors Président de l'Académie des Sciences, je déposai le compte-rendu de cette expérience, sous pli cacheté à l'Académie, en 1974. J'en déposai 3 autres à la suite.

En 1986, le Professeur Georges Millot, Doyen de l'Université de Strasbourg, Président de la Société Géologique de France, membre de l'Institut, en pris connaissance et me proposa d'en faire une note aux comptes-rendus de l'Académie des Sciences. Ce qui fut fait. Une seconde note parut en 1988 qui montre notamment qu'un dépôt sur une pente à 15°, présente une lamination parallèle à la pente, ce qui infirme le début du principe de superposition selon lequel les couches se seraient déposées à l'horizontale. Après cette publication, le Doyen Millot me fit admettre comme sédimentologue à la Société Géologique de France.

Ayant achevé mes expériences sur la lamination, je voulus en réaliser sur une stratification de plus grande épaisseur. Pour cela il fallait opérer dans un canal à parois transparentes, parcouru par un courant d'eau recirculant chargé de sédiments, se déposant dans le canal; les variations de la vitesse du courant devaient entraîner une sélection de la taille des particules déposées, créant dans le dépôt un classement vertical, caractéristique de la stratification. A cet effet, je conclus en 1990 un contrat avec le laboratoire d'hydraulique de l'Université du Colorado. Pierre Julien, professeur d'hydraulique et de sédimentologie, réalisa les expériences.

imgLe compte-rendu fut publié dans le bulletin n°5 - 1993 de la Société Géologique de France. On lit dans le résumé: "Ainsi donc, l'identification des strates rocheuses à des couches sédimentaires successives, et les principes qui en résultent, notamment les principes de superposition et de continuité, sont mis en défaut expérimentalement".

Les expériences montrent en effet qu'une couche, définie comme la masse sédimentaire déposée entre deux instants consécutifs, recoupe les strates superposées, de sorte que des parties des différentes strates appartenant à cette couche sont de même âge et ne se succèdent pas, et que chaque strate se déposant progressivement dans le sens du courant d'amont en aval dans le canal, n'est pas de même âge en tous points. Les fondements de l'échelle des temps géologiques sont donc infirmés.

Ces expériences ont été reproduites à plus grande échelle en 1993, et filmées pour réaliser une vidéocassette intitulée "Expériences fondamentales de stratification". Elle a été présentée au 3ème Congrès de français Sédimentologie en 1993; en congrès international en 1994, européen en 1995, ainsi qu'à un Atelier organisé par le groupe de recherche du CNRS animé par le Professeur P. G. de Gennes, prix Nobel de Physique, dans le même temps que paraissait, dans le numéro hors-série de Science et Vie de septembre 1995 consacré à P. G. de Gennes et son équipe, un article de Pierre Evesque, directeur de recherche au CNRS, sur la mécanique des poudres, se référant à nos expériences. Cette cassette a été intégré en 1995 dans la cassette Drame dans les roches.

Puisque nos expériences ont montré que l'écoulement non-uniforme d'un courant chargé de sédiments, produit les lits stratifiés, nous avons engagé un nouveau programme expérimental pour déterminer les relations fonctionnelles entre conditions hydrauliques et stratification.

Outre ce qu'apportent nos expériences, je citerai par exemple le compte-rendu de Rubin et Me Culloch dans Sedimentary Geology 26 (1980) 207, 231: "La détermination des conditions hydrauliques dans lesquelles existent les dépôts observés, indique que la configuration des dépôts, en chaque site de la baie (de San Francisco), est fonction de la vitesse locale du courant, de la taille des particules et de la profondeur".

La connaissance de ces relations fonctionnelles, issue de telles observations, doit permettre, réciproquement, de déterminer à partir de la configuration des strates rocheuses, les conditions hydrauliques qui ont présidé à leur formation.

Il s'agit donc de substituer une méthode scientifique empirique fondée, outre les observations en géologie, sur les observations et les expérimentations réalisées en sédimentologie, à une interprétation théorique erronée de la stratification. De ce fait, on remet en question l'échelle des temps géologiques et la succession des espèces.

On peut également remettre en question la chronologie absolue déterminée par la datation radioactive.

J'ai fait récemment dater une dacite provenant de l'éruption du volcan St. Helen (USA) en 1986. Le tableau ci-joint rend compte des résultats (340 000 à 2 800 000 ans selon le minerai). Est remise en cause, l'hypothèse admise que la lave est dégazée au moment de l'éruption, de sorte que l'argon serait issu de potassium radioactif seulement depuis la cristallisation. Darymple cite cinq autres cas similaires. John Woodmorappe a établi le liste de discordances manifestes, pour plus de 350 échantillons de roches, entre âge stratigraphique et datation radioactive.

En conclusion de ces travaux et pour ce qui concerne la théorie de l'évolution des espèces qui se fonde sur l'échelle des temps géologiques, on voit l'extrême importance de l'infirmation des méthodes de datation tant stratifiques que radio-chronologiques. Des espèces marines en succession dans l'échelle peuvent aussi bien correspondre, si la superposition est réelle dans un bassin, à une répartition écologique en profondeur ou si-non à une répartition écologique dans l'espace marin. Tant qu'on n'aura pas remis les choses en place, on ne pourra scientifiquement rien dire de définitif sur l'évolution. En conclusion finale je citerai cette maxime de Fénelon:

"La plupart des erreurs des hommes ne viennent point tant de ce qu'ils raisonnent mal à partir de principes vrais, mais bien plutôt qu'ils raisonnent juste à partir de principes faux ou de jugements inexacts."

La science, pour rester sur le chemin de la vérité doit toujours partir de faits observés et expérimentés pour élaborer des hypothèses, et non partir de lois ou principes formulés à priori par l'homme, car la nature ne doit rien à nos concepts.

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1 - Ndlr: Les travaux récents d'histoire des sciences sur cette période montrent que le système de Ptolémée était couramment discuté au sein des universités. Mais Galilée eut le tort de vouloir se mêler de théologie et d'exégèse sans y être préparé.
2 - Ndlr: C'est la Marquise du Châtelet, l'amie de Voltaire, qui traduisit en français et popularisa donc les "Principia"

Ceshe 1999 -